Le Québec et les monnaies locales

2008, crise économique mondiale. Des citoyens un peu partout dans le monde critiquent la spéculation, les systèmes financiers de grandes échelles et la mondialisation. Cherchant des alternatives, plusieurs tombent sur le concept des monnaies locales. Ça bouge. Des associations se créent en Europe à vitesse grand V. Pendant ce temps au Québec… presque rien.

Pourquoi ?

Je dois dire que j’ai été assez surpris de voir à quel point le mouvement des monnaies locales n’avait pas pris son envol au Québec. Reconnu pour être un lieu de solidarité, d’équité, de justice sociale, le Québec aurait dû être un terreau absolument fertile pour ce genre de mouvement citoyen. Pourtant, mis à part quelques petites initiatives, aucun projet structurant et d’envergure n’a vu le jour avant que le projet de la Chouenne ne change la donne. Je me suis beaucoup questionné sur ce qui a causé ce retard vis-à-vis le mouvement mondial qui était en marche. Je pense que j’ai quelques éléments de réponses.

Le québec et la crise de 2008

La crise a-t-elle été en partie épagrnée ?

Premièrement, le Québec a été un endroit assez protégé face à la crise de 2008. En 2008, j’étais au CÉGEP et on parlait de la crise dans nos cours et dans les journaux, mais je n’ai pas eu le sentiment que le Québec s’enfonçait dans une situation économique particulièrement inquiétante. Mes impressions ont été confirmées à la lecture de l’article L’ampleur de la récession au Québec et les défis de la reprise de Jean-Pierre Aubry. Le Québec a mieux fait que l’Ontario, le reste du Canada, ainsi que les États-Unis.

Les crises et les monnaies locales

Comment les crises catalysent les MLC

Ne nous leurrons pas, les crises sont des catalyseurs pour les monnaies locales. La crise économique des années 30 aura été marquante dans les expériences Schwanenkirchen (1931) et de Wörgl (1932). La crise constante des favelas aura amené la création de la banco Los Palmas (1998) et la crise de 2008 aura amené 15 monnaies locales uniquement en France (dont l’Eusko) entre 2010 et 2013.
Au Québec, la pandémie de COVID-19 aura motivé un projet qui deviendra finalement la Chouenne (2021) en plus du dollar solidaire à Québec (2020).
La plupart du temps, les événements suivent un cycle assez précis. Premièrement il y a une crise. Cette crise amène les gens à avoir des réflexions. Les réflexions se transforment en un premier projet et ce projet mènera à développer d’autres projets subséquents.
Revenons-en au Québec ainsi qu’à 2008. La crise aillant été moins dure par chez nous, le cycle n’a pas suivi son cours normal.

L'importance de desjardins

Desjardins face aux banques traditionnelles

Le deuxième point assez important qui a nui au développement des monnaies locales au Québec est définitivement la caisse Desjardins. Les gens à travers le monde qui critiquent le système financier, vont trouver qu’ils n’ont pas de pouvoir, que le système est mis en place pour une poignée d’actionnaires qui s’en mettent plein les poches et que les banques ne contribuent pas au milieu.

Or, au Québec, nous avons une fédération de coopérative qui donnent le droit de vote aux membres et qui redistribue amplement dans l’économie et dans la solidarité sociale. Les Québécois, profitant des ristournes, des votes en assemblées et des aides au milieu de Desjardins ne sentent pas que le système est si problématique. Il faut noter que Desjardins est un cas unique dans le monde qui est née d’un mouvement populaire et qui a contribué à l’essor des régions et des francophones en général.

C’est donc moins amoindris devant la crise de 2008 tout en aillant la possibilité de faire affaires avec une des institutions financières les plus éthiques au monde que les Québécois ont regardé le train des monnaies locales passer sans vouloir y accrocher leur wagon.

En conclusion

Devenons bâtisseurs

Je suis convaincu que ce feu citoyen et solidaire qui brûle en nous, celui-là même qui nous a permis de déployer un système bancaire coopératif solidaire unique au monde est le même qui nous permettra de développer au travers du Québec des monnaies locales fortes et stables qui auront le potentiel d’être des exemples à l’échelle mondial. Desjardins a d’ailleurs été une ressource inestimable pour le projet de la Chouenne et l’est tout autant sinon plus pour le projet de la Petite-monnaie.

Nous avons le terreau parfait, à nous d’y semer la bonne graine.

Blogue Petite Monnaie